VISITE DU PORTE-AVIONS CHARLES DE GAULLE

Le club Dandizan d’Aspen France a organisé, samedi 9 novembre 2013, une visite du porte-avions Charles de Gaulle, à l’invitation de son commandant Pierre Vandier.

En service depuis 2001, le porte-avions Charles de Gaulle est un instrument de souveraineté : grâce au libre usage de la haute mer, il permet à la France d’intervenir partout et de peser dans les affaires du monde. Avec 1900 hommes d’équipage et 40 avions embarqués, sa mission centrale est la projection de la force de frappe aérienne, classique et nucléaire, au plus près des théâtres d’opération. Mobilité et puissance de feu sont les deux mots-clés qui permettent de résumer les atouts d’un tel navire.

Grâce à sa propulsion nucléaire, le Charles de Gaulle surpasse largement le Foch et le Clemenceau. Il fait partie, avec les porte-avions américains, de la catégorie de bâtiments capables de mettre en oeuvre des avions lourds (gamme 20-30 tonnes). La propulsion nucléaire (sept ans d’autonomie énergétique) permet une grande autonomie de déplacement (1000 km par jour, 45 jours de totale autarcie et une dépendance au ravitaillement en carburant limitée à l’avitaillement des avions). Grâce à son pont d’envol qui catapulte des avions de combat conventionnels, la portée d’action du porte-avions s’étend jusqu’à environ 1500 km à l’intérieur des terres. Grâce au positionnement au plus près des cibles, le Charles de Gaulle permet à la fois d’augmenter nettement la fréquence des missions par rapport à des opérations initiées depuis la métropole et de déployer une force aérienne sur des théâtres éloignés du territoire français.

Le capitaine de vaisseau Pierre Vandier, commandant du Charles de Gaulle, a pour mission de positionner précisément son navire par rapport au vent pour assurer la bonne position des pistes d’envol et d’appontage. Il se retrouve donc étonnamment « comme un régatier » à l’écoute de la brise et du vent. Le navire est de sortie pendant 180 jours par an pour des entraînements en haute mer ou pour des missions dans le cadre des coalitions auxquelles participe la France : interventions régulières en soutien des opérations en Afghanistan depuis 2001, intervention en Libye en 2011…

Le Charles de Gaulle a coûté de l’ordre de 3 milliards d’euros (répartis sur les 10 ans de sa construction). Son entretien coûte de l’ordre de 80 millions d’euros par an (soit 10% de l’entretien de la flotte). Particulièrement stable grâce à un système de ballast mobiles sous le pont d’envol et de safrans dynamiques anti-houle, le Charles de Gaulle peut assurer l’envol et l’appontage des avions par mer houleuse à très houleuse. Pendant les opérations en Libye, 50% des missions ont été accomplies de nuit (mars à octobre 2011).

Le porte-avions sort toujours accompagné, il est le bâtiment central d’un groupe aéro-naval qui assure la reconnaissance de sa zone d’action, sa propre protection (sous-marine, sur mer et aérienne) et sa force de frappe. L’ensemble est composé d’une quarantaine d’aéronefs dont des Rafales et Super-Etendards, des avions de surveillance de l’espace aérien (Hawkeye), des hélicoptères. Il est escorté par des frégates et d’un sous-marin nucléaire pour la surveillance de l’environnement marin ainsi que la protection de la zone d’approche, et d’un ravitailleur (vivres, maintenance et carburants pour les avions).

On observe un intérêt croissant pour les porte-avions dans les pays émergents, qui sont nombreux à vouloir s’en doter. Le pays le plus avancé est l’Inde, qui a récupéré deux anciens porte-avions britanniques et qui en a remplacé un des deux par un russe. Le Brésil a acquis le Foch, devenu São Paulo, en 2001. La Russie avait une bonne expertise qu’elle a mise en sommeil pendant la décennie post-guerre froide. Elle reprend doucement ses efforts en la matière. Si ces quelques porte-avions « émergents » peuvent accueillir des avions de combat conventionnels à long rayon d’action, seuls la France avec Charles de Gaulle et les Etats-Unis (qui en possèdent 11, dont le Gerald Ford, mis en service en novembre 2013) forment le club extrêmement restreint des pays à posséder des porte-avions à propulsion nucléaire, mobiles dans le monde entier sans dépendre de bases alliées locales.

Avec la capacité du Charles de Gaulle à embarquer l’arme nucléaire, ce club est également celui des puissances mondiales capables de projeter leur force de dissuasion partout dans le monde. La France a fait de son porte-avions une pièce maîtresse de l’OTAN et des coalitions auxquelles elle participe. L’interopérabilité du Charles de Gaulle lui permet d’accueillir des avions américains embarqués et représente à ce titre une arme au service des intérêts partagés de la France dans la gestion des affaires du monde. En ce sens, on peut le voir à la fois comme un élément très différenciant par rapport à tous les autres pays européens et nombre de grandes puissances, mais aussi comme un instrument précurseur dans le domaine encore balbutiant de la défense commune européenne.

A bord du porte-avions vit une société à part entière. On observe un lent processus de féminisation, avec 200 femmes sur 2000 hommes, même si 90% des femmes occupent des postes de matelots ou de sous-officiers, qu’elles ne représentent que 10% des officiers (subalternes), et qu’actuellement aucune femme n’est officier supérieur. Par ailleurs et surtout, le porte-avions est un tremplin de qualification pour près d’une centaine de jeunes qui opèrent en tant que matelots de pont d’envol. Un pourcentage significatif d’entre eux est recruté avec un très bas niveau scolaire (environ 40% sont issus de la région PACA, notamment de Marseille). C’est pour eux une « deuxième chance » et l’encadrement le considère ainsi. Pour les plus motivés d’entre eux, il y a la possibilité de gravir les échelons et de devenir sous-officier, voire officier. Plus de la moitié des officiers à bord du Charles de Gaulle a commencé sa carrière comme sous-officier ou même matelot. L’armée reste un des endroits où l’ascension sociale fonctionne encore.

Merci pour leur accueil et leurs explications à Pierre Vandier, commandant du Charles de Gaulle, à Laurent Sudrat(commandant en second), à Jacques Mallard (commandant des opérations), et Emmanuel Sagorin (officier opérations de l’Etat-Major du groupe aéro-naval).

Consulter l’album photo de la visite ici.

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