RENCONTRE AVEC BENOIT VARIN

Compte-rendu de la visite de ReCommerce avec Benoit Varin, DG Opérations et Ventes et Co-fondateur de ReCommerce, le 7 avril 2014 à Gentilly, dans le cadre du thème annuel du club « Comment innover en France de manière responsable et solidaire ? ».

 Qu’est ce qu’on fait maintenant ? De l’innovation ! Telle est la réponse que le club a voulu explorer cette année.

L’innovation ça se voit. Plutôt qu’un long discours la visite s’impose. Nous voilà partis, pour notre première visite, à Gentilly, « Cité des artistes ». Quel programme ! La Cité des artistes est un ensemble formé par les ateliers d’une ancienne fabrique de pain d’épice maintenant biscuiterie à deux pas du Parc Montsouris. L’architecture d’origine confère à l’ensemble un côté très atypique qui sied bien à notre start-up.

Vous avez dit « start-up » ? Quel est son pitch ? Récupérer les téléphones portables, objets si rapidement obsolètes, et permettre d’en allonger la durée de vie.

Aujourd’hui, après cinq ans d’existence, c’est 50 000 téléphones par an qui sont ainsi récupérés et revendus. C’est, certes, une goutte d’eau dans l’océan des téléphones et terminaux mobiles mais la croissance de l’entreprise permet d’envisager à terme qu’une part significative des téléphones et terminaux mobiles, voire des tablettes bénéficieront ainsi d’une seconde vie.

La valeur ajoutée de ReCommerce se situe dans la gestion du processus complet (la collecte des téléphones, leur tri, leur reconditionnement, leur revente) par un logiciel adaptatif.

Comment ça marche ? Le logiciel ReCommerce s’adapte au portail Web des collecteurs (opérateurs de téléphonie mobile, associations caritatives, etc) et propose en ligne un prix pour l’appareil à récupérer grâce à un « scoring », technique similaire à celle du crédit à la consommation sur point de vente. Une fois la proposition de récupération acceptée, le logiciel gère en temps réel le stock de téléphones, l’acheminement rapide vers les points de reconditionnement et l’état d’avancée du processus de reconditionnement. Dès que le produit est reconditionné, le logiciel pilote sa revente, prix et circuit, en gros via des discounters, ou au détail via les grands sites de e-commerce.

Qu’est-ce qui en fait une entreprise emblématique d’aujourd’hui ? Elle est définitivement dans une nouvelle ère, celle où la gestion du processus et le marketing ont pris le pas sur la production, celle-ci devenant un module externalisé à sous-traitant.

C’est une entreprise digitale : les solutions logicielles de suivi en temps réel et de « pricing » et le marketing qui permet au processus de s’intégrer dans les circuits de collecte et de revente sont les réels produits de l’entreprise. Elle propose ainsi une solution clef en main aux collecteurs pour fidéliser leurs clients et augmenter leur chiffre d’affaire par une offre de reprise et aux distributeurs un produit de type discount dans leur gamme de téléphones.

Elle s’inscrit dans le mouvement du développement durable. Sa mission, c’est d’allonger la durée de vie d’appareils polluants et porteurs de métaux rares. Sa stratégie se veut locale, réduire le circuit physique parcouru par les appareils. Ainsi, elle s’adresse à sept ateliers en Europe à qui elle sous-traite la partie industrielle du processus. La masse salariale qui compte pour 15% du coût du reconditionnement permet cette stratégie locale. Elle s’adresse prioritairement et de façon stable aux ateliers de travailleurs handicapés et gère les aléas avec les ateliers des grands acteurs européens de l’électronique.

Elle a tout d’une grande : dès la départ, le logiciel a été conçu pour s’adapter à plusieurs canaux en amont – collecte – et en aval – distribution – et gérer le temps réel. Ainsi, il ne devrait pas y avoir à reconstruire l’outil quand la taille de l’entreprise atteindra un seuil dans sa gestion interne.

Il fait bon y vivre. Le turn over est très faible, presqu’aucun départ depuis quatre ans et très peu de période d’essai non conclusives. Le rapport au travail semble fondé sur la responsabilité, le travail effectivement accompli plus que sur le contrôle de la méthode ou des horaires. Avec près de 70 employés aujourd’hui – l’entreprise double son effectif chaque année – l’entreprise conserve des rituels conviviaux : chaque nouvel arrivant choisit une plante qu’il entretient pas la suite. La grande salle à manger où nous avons dîné, accueille tous les collaborateurs qui le souhaitent au déjeuner. Avec l’aide d’un cuisinier employé d’une entreprise solidaire de service aux entreprises, ce sont chaque jour deux employés qui chacun à leur tour préparent le repas.

Le propos aujourd’hui n’est pas l’analyse de cette entreprise au sens financier et économique du terme, son potentiel de croissance, de rentabilité et ses risques, mais bel et bien d’aller voir une de ces petites nouvelles qui prennent rapidement des places dans le monde des grandes.

Parmi nos visiteurs, certains, fins connaisseurs du monde des start-up hors de France suggèrent que le modèle de l’entreprise moderne, digitale, alternative existe dans toutes les places innovantes (Californie, Shangai, Mumbai…). L’entreprise que nous avons visité semble bien en faire partie.

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